Au Mondial de l'auto, les salariés roulent pour leur emploi et leur retraite
Au Mondial de l'Automobile, vendredi à Paris, tous les visiteurs avaient le regard braqué sur eux et les flashs crépitaient à leur passage : les salariés de l'automobile, venus manifester pour l'emploi et les retraites, ont volé la vedette aux dernières modèles Renault ou Jaguar.
"Sans nous, pas de bagnoles", "salariés licenciés, sous-traitants liquidés, ça ne peut plus durer, ça va péter", a entonné un groupe derrière une banderole CGT métallurgie, à l'origine de cette mobilisation.
Les quelque 1.900 manifestants selon la police, 3.500 selon le syndicat, se sont dispersés dans le salon qu'ils ont animé de leurs sifflets et drapeaux rouges.
"Y en a ras-le-bol de voir des bagnoles ultra-modernes fabriquées partout sauf en France", a tonné Mickaël Wamen, responsable CGT de l'usine Goodyear d'Amiens-Nord, devant cette "vitrine technologique".
Le thème des retraites était aussi porté haut : "40 ans de chaîne, c'est la haine : retraite à 55 ans" ou "L'or de Peugeot, et Bettencourt pour nos retraites", pouvait-on lire sur leurs pancartes ou sur des autocollants apposés sur des Renault Latitude ou Citroën C-zéro.
Ces salariés de la firme au losange, de PSA, Michelin, Ford Blanquefort ou encore Faurecia avaient entamé leur défilé au métro Javel (XVe arr.) en direction de la porte de Versailles où se tient le salon jusqu'au 17 octobre.
Leur entrée avait été négociée avec les organisateurs par la CGT, qui a demandé le calme à ses troupes. "Il est de tradition qu'ils puissent visiter le Mondial puisque ce sont des ouvriers qui travaillent dans l'industrie automobile", a expliqué le directeur technique du Mondial, Jean-François Imbert, insistant sur la notion de "visite".
C'est plutôt à une manifestation qu'ils se sont livrés, sous l'oeil curieux et majoritairement bienveillant des visiteurs. "Ils sont un peu trop bruyants mais ont de bonnes raisons d'être là", a estimé Jocelyne Delaunay, retraitée de 64 ans de Seine-Maritime.
"Mettre la pression sur les dirigeants de cette façon, ça ne peut pas faire de mal, et cela montre aux gens que tout ne tourne pas rond dans l'automobile", glisse un jeune homme... lui-même prestataire de PSA.
Nombre de visiteurs étrangers ne comprenaient pas grand-chose à cette agitation. "Ils sont légitimes à manifester", jugeait cependant un Japonais, Masanori Takaku, un peu bousculé.
"Les salariés ont payé un lourd tribut en raison de la crise, en pertes d'emplois et de salaires. La situation de l'automobile s'améliore et pourtant les gains de productivité et les pertes de pouvoir d'achat, ça continue", selon Fabien Gâche (CGT Renault).
L'année 2010 a été marquée par une reprise de la production mondiale de véhicules, qui devrait retrouver son niveau de 2008, autour de 71 millions d'unités, contre 62 millions l'an dernier, selon la Fédération des équipementiers automobiles français.
Au gré de la restructuration de la filière, des fermetures d'usines interviennent encore, comme celle de Cooper-Standart (fabrication de joints) à Bolbec, près du Havre, où 316 emplois doivent disparaître en mars 2011. "Aucune solution ne nous est proposée alors on va se battre pour la prime de licenciement", clame Magalie Paimparay, ouvrière de 39 ans.
"Michelin champion du monde des fermetures d'usines", arboraient des salariés de Clermont-Ferrand sur leur T-shirt. A la sortie, après deux bonnes heures de visite, ils se projetaient dans leur prochaine action, ce mardi dans le cadre de la journée interprofessionnelle pour les retraites.
(AFP)