Réforme des retraites : le mouvement de protestation se durcit en France
Alors que les annonces de grèves reconductibles se multiplient dans plusieurs secteurs, l’Elysée a annoncé jeudi 7 octobre 2010 des aménagements à sa réforme des retraites. Insuffisant, estiment les syndicats qui réclament l’ouverture d’un vrai dialogue social.
Est-ce la perspective d’une radicalisation du mouvement social qui a fait bouger l’Elysée ? Toujours est-il que ce matin, jeudi 7 octobre 2010, quelques heures après la décision des syndicats de cheminots d’appeler à des grèves reconductibles à partir du 12 octobre, Nicolas Sarkozy a consenti à des aménagements à sa réforme des retraites. Le premier concerne certaines mères « qui se sont arrêtées au moins un an dans les trois ans suivant la naissance d'un de leurs enfants ». Pour elles, l'âge de la retraite sans décote sera maintenu à 65 ans « pendant une période transitoire de cinq ans ». L'autre touche « les parents d'enfants handicapés » qui pourront conserver ce même avantage « de manière pérenne ». Pas question donc pour l’Elysée de revenir sur le cœur de sa réforme, à savoir le report de l’âge minimal de départ en retraite de 60 à 62 ans, et de 65 à 67 ans pour une retraite à taux plein.
Les centrales syndicales ont toutes jugé insuffisantes les concessions gouvernementales, même si certaines ont reconnu des avancées. La CFDT a ainsi estimé que ces propositions constituaient « un pas en avant » mais que le projet de loi demeurait « très insatisfaisant ». La CGT a pour sa part jugé que ces amendements n'étaient « pas de nature à modifier la critique fondamentale sur le projet de réforme ». « Cela fait toujours une très mauvaise réforme pour la masse des salariés et c'est sur cette base là que nous allons continuer à mobiliser le 12 octobre
», a précisé son secrétaire général Bernard Thibault, en référence à la prochaine journée de mobilisation prévue le mardi 12 octobre, la cinquième du genre depuis début septembre.
Multiplication des préavis pour des grèves reconductibles
Si l’intersyndicale doit se réunir dès demain pour décider des suites à donner aux grèves et aux manifestations du 12 octobre, certaines fédérations ont d’ores et déjà appelé à des actions reconductibles. C’est le cas des cheminots qui se réuniront dès le 13 au matin en assemblées générales à travers tout le pays pour décider de poursuivre ou non leur grève. Ils estiment en effet que les grèves d'une journée organisées jusqu'à présent n'ont servi à rien face à un gouvernement qui, selon eux, refuse tout dialogue.
D’autres fédérations se sont également prononcées en faveur d’un durcissement de leur mouvement. Des préavis pour des grèves reconductibles ont ainsi été déposés dans les transports urbains, à Paris et en province. A La Poste et chez France Télécom, des actions similaires seront entreprises à partir du 12 octobre. Le secteur de l’énergie n’est pas épargné avec des préavis déposés dans quelque 140 entreprises électriques et gazières. Le transport maritime sera également perturbé et dans la fonction publique, certaines administrations tourneront au ralenti.
Marseille déjà touché
Le mouvement social devrait donc se radicaliser à partir de la semaine prochaine dans toute la France alors qu’à Marseille plusieurs conflits - retraites, pénibilité et réforme portuaire - ont perturbé le fonctionnement du port, le premier du pays. Les terminaux pétroliers de Fos-Lavera sont ainsi à l’arrêt pour la onzième journée consécutive. Les grévistes ont été rejoints mercredi par leurs collègues en charge du transport de marchandises. La semaine dernière, ils avaient déjà cessé le travail trois jours. La CGT des ports et des docks a par ailleurs appelé à cesser le travail le week-end prochain avant la journée de mobilisation de mardi.
Ces grèves menacent le sud-est de la France d’une pénurie de carburant qui a déjà touché la Corse où les stations-service sont presque toutes à sec. Un pétrolier italien transportant 6 000 m3 de gasoil est arrivé jeudi soir à Ajaccio, en provenance de Sardaigne, pour ravitailler l’Île. Le rationnement est toutefois maintenu et le retour à la normal devrait encore prendre plusieurs jours.
(RFI)