Une grève dure se dessine dans les raffineries
Si des perturbations subsistent dans quelques réseaux de transports et dans près de 130 lycées, le point le plus chaud des conflits sociaux se situe dans les secteurs du pétrole, où la question d'une pénurie de carburant dans les stations-service se posera à court terme, selon les syndicats. Dix des douze raffineries en France sont affectées à des degrés divers. Les six du groupe Total sont en cours d'arrêt en raison de la grève contre la réforme des retraites. Il faut ajouter à cela la grève des terminaux pétroliers du port de Marseille, qui entre dans son 17e jour, et celle, inégale, des personnels des terminaux pétroliers un peu partout en France.
A Total, la CGT, syndicat majoritaire, a appelé à la grève reconductible. Elle n'hésite pas à dire qu'elle se dirige "vers quelque chose de dur". "Les salariés regardent ce qui se passe dans les autres secteurs, ils ne veulent pas être les seuls dans un bras de fer avec le gouvernement, mais leur état d'esprit est combatif", estime Charles Foulard, coordinateur CGT du groupe.
Dans cinq des six raffineries, entre 50 et 80 % du personnel posté avait cessé le travail mardi, selon la direction. Les six autres raffineries françaises, qui appartiennent aux groupes LyondellBasell, Esso, Ineos et Petroplus, sont également perturbées. Des assemblées générales de grévistes auront lieu mercredi dans quasiment toutes les raffineries de métropole pour décider d'une éventuelle reconduction du mouvement.
"IL N'Y A PAS DE RAISON QU'IL Y AIT DE PÉNURIE"
"Puisque le gouvernement ne veut pas nous écouter quand on est dans la rue, on va appuyer sur la partie économique. Avec les raffineries, on peut bloquer en deux jours l'alimentation en carburants de la France", a prévenu Yvon Scornet, un responsable de la CGT à Total. Les responsables des groupes pétroliers se veulent toutefois rassurants et rappellent qu'ils disposent, en cas de pénurie, de stocks de sécurité pour quatre-vingt-dix jours.
"Il n'y a pas de problème d'approvisionnement en carburants, les dépôts sont pleins", a assuré Total, indiquant avoir pris "les dispositions nécessaires". "Il n'y a pas de raison qu'il y ait de pénurie, sauf si les gens se ruent sur les stations-service", a aussi fait valoir une porte-parole d'Esso. Des médias locaux commencent toutefois à faire état de comportements de stockage de la part des automobilistes. Pour la CGT du groupe Total, "la pénurie de carburant est bien à l'ordre du jour dans un très proche avenir contrairement aux propos de l'Union française des industries pétrolières (UFIP) et du gouvernement".
En cas de difficultés prolongées, la France peut s'approvisionner auprès des stocks stratégiques à la demande du gouvernement et après accord de l'Agence internationale de l'énergie. Ces stocks représentent trois mois de consommation. L'utilisation de ces stocks n'a pour l'instant été évoquée ni par le gouvernement, ni par l'UFIP.
La situation des raffineries en France, mercredi. En rouge, les usine touchées par des mouvements de grève. En blanc, celles qui fonctionnent normalement.
(le monde)